AVALANCHE est un projet de recherche créé par TVK, Anyoji Beltrando et KH studio, dont l’ambition est d’étudier les grandes questions actuelles auxquelles l’être humain se voit confronté pour habiter la planète. À travers l’étude des territoires et des logiques mondiales de développement, de leurs transformations et de leurs vulnérabilités sous l’effet des évolutions exponentielles de la démographie, des flux et de l’exploitation de l’environnement, AVALANCHE explore par l’enquête des situations ou des thèmes marquants.
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La mer dissout la Terre
À l’heure du suprématisme urbain et de sa doxa érigeant les métropoles en système organisant le monde, la mer Méditerranée, espace où fut inventée une des formulations les plus puissantes de l’urbanité et de la ville, est aujourd’hui un lieu vertigineux. Elle est simultanément un lieu de baignade et un lieu de mort, une frontière ardente entre nord et sud. Mais ce qui en fait un espace réellement paradoxal – au sens direct, à l’encontre de la doxa – tient à ce que, de limite physique ancestrale, la Méditerranée est devenue un trait d’union entre les océans, un chaînon essentiel dans la nouvelle « circularité » du monde. Du paradigme antique d’une mer intérieure, bassin de vie unitaire et domestiqué, on est passé à un espace maritime ouvert, connecté et totalement dissout dans le système mondial.
Instrument globalisateur du processus métropolitain, le système maritime en est le produit mais pourrait aussi en être le fossoyeur : la métropole porte dans ses gènes les facteurs de sa propre disparition. Bassin qui a vu naître la civilisation urbaine, les premières villes-mères, la Méditerranée fait partie des espaces mondiaux où pourrait émerger une alternative à la métropole, qui s’affranchirait des conditions fondamentales de proximité, de continuité terrestre et de concentration.
Récits d’effondrements
Le mythe de Babel présageait la chute de la « première mégapole »1, effective plus d’un millénaire plus tard, et constituait ainsi une puissante mise en garde contre la démesure et les excès des édifications humaines. À l’aune de la modernité et alors que les rythmes effrénés de la construction imposent désormais l’urbanisation comme la forme prédominante des établissements humains, des récits populaires continuent plus que jamais d’annoncer les fléaux et l’effondrement des formations urbaines. Le cinéma autant que la littérature et les séries télévisées forment un corpus d’œuvres narratives qui explorent ou anticipent le risque, la menace ou la catastrophe au sein de la ville contemporaine, aujourd’hui majoritairement en lien avec des déterminismes environnementaux.
AVALANCHE s’intéresse à ces œuvres fictionnelles, dans lesquelles les paysages urbains procèdent d’un système de représentation et de narration. Elles constituent une tentative de saisir et renseigner un état du monde contemporain marqué par l’accélération, la démesure et l’évolution exponentielle, et qui suscite ou fabrique ses propres menaces. Elles révèlent les préoccupations de notre civilisation urbaine quant à l’habitabilité des sites sur lesquels elle s’est établie et aux risques intrinsèques à l’occupation terrestre.
Chocs environnementaux chiliens
Alejandro Aravena (mars 2014)
« Future will be about moving backwords, to simple things and not towards complicatedness. We’ll need to move towards things that are irreducible, that can’t get simpler… »
Rodrigo Araya (mars 2014)
« We’ve experimented a totally new process for decision taking in spatial issues; a process in which everybody could find it’s own interest. »
Jorge Heitmann (mars 2014)
« Getting to know how local communities work and function can make us understand the major role the may play in the near future. »
« En 1570, vingt ans à peine après la fondation de Concepción, la ville était détruite par un violent séisme. Le même scénario s’est répété en 1658, puis en 1751. Suite à cette catastrophe, le site originel de Concepción a été abandonné et les habitants se sont déplacés vers le site actuel de la capitale régionale, au bord du rio Biobío. Il s’agissait de se protéger non seulement des secousses sismiques mais aussi des effets dévastateurs des tsunamis qui suivent les mouvements de la croûte terrestre et balaient les agglomérations situées sur le littoral. Ce déplacement n’a pas empêché Concepción d’être à nouveau détruite en 1835. Un nouveau projet de transfert vers une zone moins sensible a été envisagé, mais il n’a pas été mis en œuvre. Les tremblements de terre suivants, en particulier ceux de 1906, 1928, 1939, 1960 (9,5 sur l’échelle ouverte de Richter) et 1985 ont prouvé qu’un tel déplacement n’aurait servi à rien. »
Alain Musset
Professeur et directeur du département d’histoire de l’EHESS, Paris
Pierre Alain Trévelo et Antoine Viger-Kohler (associés), David Enon (directeur de projet) et Océane Ragoucy (directrice stratégies, recherche, développement)